Utilisation des biens acquis par l’État à la suite de la tempête Xynthia

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour exposer sa question n° 1585 relative à l’utilisation des biens expropriés à la suite de la tempête Xynthia.

M. Jean-Louis Léonard. Monsieur le ministre chargé des transports, mis en place très rapidement, le dispositif d’acquisition à l’amiable par l’État des biens sinistrés à la suite de la tempête Xynthia a permis de mettre hors de danger les habitants de secteurs particulièrement dangereux, notamment à Charron où s’était rendu le Président de la République, et à La-Faute-sur-Mer, dont on savait qu’aucun dispositif ne pourrait les protéger efficacement.

Aux Boucholeurs, sur la commune de Châtelaillon, ce n’était pas le cas. Il a fallu un an et demi pour que les services de l’État admettent qu’il était parfaitement possible de protéger efficacement le site contre des événements comme Xynthia et que la zone noire des Boucholeurs n’avait pas de raison d’être.

Les propriétés acquises par l’État deviennent au fil du temps de véritables friches, car elles sont totalement laissées à l’abandon. Nous avons peu de visibilité sur le devenir de celles-ci et sur les intentions de l’État. Pour imaginer sereinement l’avenir, nous avons besoin de réponses précises et d’un accompagnement de la part de l’État qui s’est entêté à encourager la vente de ces maisons, alors même que nous dénoncions le zonage.

Pour ces biens, l’État s’est engagé à procéder à leur destruction. Sur des sites tels que Charron où les destructions doivent commencer d’ici à la fin du mois d’octobre, la démolition ne semble pas poser de problèmes techniques majeurs. Ce n’est pas le cas partout, notamment aux Boucholeurs, à Fouras ou à Boyardville, dans l’île d’Oléron.

L’urbanisme particulier de ces villages de pêcheurs se caractérise par des maisons imbriquées les unes dans les autres, représentant un seul et même ensemble. La totalité des propriétaires n’ayant pas cédé leur bien à l’État, nous nous retrouvons en face d’un cas de figure où la destruction des biens propriétés de l’État est impossible, sans mettre en péril les habitations mitoyennes, et aberrante en terme d’urbanisme, car déstructurant totalement un tissu urbain ancien et dense.

Mme le préfet de Charente-Maritime a indiqué, lors de sa conférence de presse annonçant la suppression de la zone noire des Boucholeurs, qu’elle attendait des propositions de la part des collectivités. Même si cela semble un peu surréaliste compte tenu de ce qui s’est passé, nous sommes prêts à jouer le jeu pour sauver nos villages.

Mais comment faire des propositions sans savoir ce qu’il est possible d’y faire et surtout sans connaître les moyens financiers que l’État est prêt à mettre à la disposition des communes pour réparer les dégâts causés par ses décisions ?

Au nom de mes collègues de Charron, Nieul-sur-Mer, Yves, Fouras, l’île d’Aix et Boyardville dans l’île d’Oléron, je vous demande, monsieur le ministre, de nous apporter des réponses tant sur les possibilités d’utilisation de ces maisons ou terrain, que sur les moyens financiers mis à disposition par l’État pour permettre leur réalisation.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports.

M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports. Monsieur le député, vous avez appelé l’attention de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement sur les possibilités d’utiliser des maisons acquises par l’État au titre du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, en demandant également quels moyens financiers l’État est prêt à mettre à la disposition des communes pour permettre de réaliser ces éventuelles utilisations.

D’une façon générale, l’acquisition amiable ou l’expropriation de biens à usage d’habitation par les ressources du Fonds de prévention des risques naturels majeurs relèvent des dispositions des articles L. 561-1 à L. 561-5 du code de l’environnement. Entrent dans le champ d’application de ces dispositions légales, les maisons exposées à un risque naturel menaçant gravement la vie humaine.

Le bénéfice de ces mesures vise à soustraire les habitants d’une exposition à un tel risque. Il est accordé sous la double condition de limiter l’accès à ces maisons et d’en empêcher toute occupation.

L’article L. 561-3 est explicite sur ce point et constitue la référence qui fonde la position de l’État, à savoir que les biens exposant leurs occupants à ces risques naturels majeurs menaçant gravement les vies humaines ont vocation à être démolis – les actes de cession de ces biens établis comportent d’ailleurs systématiquement cette clause de démolition.

Les quelques cas exceptionnels où la démolition des constructions n’a pas été retenue pour satisfaire la condition d’empêchement de toute occupation concernent des biens du patrimoine ou des biens pour lesquels la démolition serait impossible, ou par exemple entraînerait la démolition d’autres biens. Dans ces quelques cas spécifiques, l’usage du bien est encadré par des conditions strictes : pas d’occupation permanente, mise en place de mesures de sauvegarde et convention de gestion entre propriétaire et utilisateur. Ces biens ne peuvent en aucun cas être réutilisés comme habitation.

Cela étant, la démolition des biens acquis ou expropriés au titre du Fonds de prévention des risques naturels majeurs demeure le principe général appliqué aux biens acquis par l’État ou les groupements de collectivités. Ce principe exclut la possibilité de réutiliser ces biens dont l’acquisition a été supportée solidairement par la collectivité nationale dans le but de faire cesser l’exposition à des menaces graves pour les vies humaines.

Mme la ministre vous invite à vous rapprocher de Mme le préfet de Charente-Maritime qui pourrait examiner dans quelles conditions et à titre exceptionnel sur la base d’un projet d’utilisation porté par les élus soumis à des conditions précises – encadrement strict des conditions d’utilisation sous la responsabilité des communes afin de garantir la sécurité des personnes, objectif qui a conduit à l’acquisition de ces biens par l’État, et exclusion de l’usage d’habitation et de tout usage nocturne – un traitement autre que la démolition pourrait concerner quelques biens de grande valeur patrimoniale que vous avez soulignés, pour lesquels la démolition serait impossible.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Léonard.

M. Jean-Louis Léonard. Mme le préfet de Charente-Maritime renvoie au ministère, et le ministère me renvoie à Mme le préfet de Charente-Maritime… Ce petit jeu a toutes chances de durer un certain temps ! En attendant, des maisons sont détruites, et pour celles situées dans une zone qui n’est plus une zone noire, car tout le monde en a convenu ainsi, le problème demeure entier et je crains qu’il ne le reste durant un bon moment.

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